Un rêve devenu réalité |
L’analyse des différents météogrammes en tous genres est la
seule occupation qui occupe les habitants d’El Chalten. Tout tourne autour de
ces diagrammes et autre courbes que chacun tente de comprendre afin
d’échafauder des plans pouvant amener au sommet d’une montagne.
C’est donc quelques jours après être arrivé dans la capitale du
massif du Fitz Roy que se profile une fenêtre exploitable. La météo annoncée prévoit
pour les 4 prochains jours à peu près cela :
- Lundi 3, 24 heures de précipitations mais sans tomber dans l’extrême et sans vent.
- Mardi 4, grand beau sans vent
- Mercredi 5, le vent se renforce et le beau est toujours présent
- Jeudi 6, des vents violents apparaissent, rendant toute escalade impossible voir dangereuse au vu des 180 km/h de vent prévu !!!
Pour nous se sera le Fitz Roy par la voie
« Franco-Argentine ». Notre stratégie et l’objectif, au vu de ces
prévisions est la suivante :
- Lundi 3, on part léger et on marche le plus loin possible, sous la pluie-neige, quitte à arriver au pied de la voie ; voir bivouaquer dedans si c’est possible. 6 heures de marche pour rejoindre le camp avancé, une heure d’approche jusqu'à la rimaye et encore environ 3h00 pour rejoindre le pied de la voie, 400m plus haut. Pour cela nous projetons de partir vers 5h00 du matin.
- Mardi 4, c’est normalement la meilleure journée, du coup il faut l’exploiter à fond. Nous essayerons de rejoindre le sommet et de redescendre au camp du « Paso Superior » pour se reposer une nuit et redescendre avant que les vents ne deviennent trop forts. Bien sûr au vu de la neige qui va tomber nous partons dans l’idée de gravir la voie en mode dry tooling, car il est annoncé entre 20 et 50cm de neige. Cette voie se fait normalement en chausson d’escalade mais nous ne prenons qu’une paire de chausson en pariant sur le fait que ce soit impossible de gravir la voie en escalade pure.
- Mercredi 5, retour pour El Chalten en 4h30.
Ça, c’était le plan prévu, avec deux repas du soir
(1xpolenta et 1x purée sans sauce) et 15 barres de céréales par personnes pour
les 3 jours. Pour le petit déjeuner un sachet de Tang par matin et un paquet de
biscuit. Là on est vraiment partis light en terme de nourriture et on le
regrettera.
Avec Ben nous sommes partis lundi 3 à 5h00 du matin d’El Chalten, il pleuviotait comme prévu.
Au début ça ne dérange pas trop mais au bout de 3h00 de marche, nous sommes trempés.
Nous décidons au passage d’une cabane rustique mais étanche de faire une pause et de mettre une couche de plus.
Le ciel est bâché et rien ne nous laisse espérer une accalmie, nous continuons coûte que coûte, de toute façon il le faut, les fenêtres de beau sont rares.
Avec Ben nous sommes partis lundi 3 à 5h00 du matin d’El Chalten, il pleuviotait comme prévu.
Au début ça ne dérange pas trop mais au bout de 3h00 de marche, nous sommes trempés.
Nous décidons au passage d’une cabane rustique mais étanche de faire une pause et de mettre une couche de plus.
Le ciel est bâché et rien ne nous laisse espérer une accalmie, nous continuons coûte que coûte, de toute façon il le faut, les fenêtres de beau sont rares.
Une heure après la pause nous arrivons sur la moraine, qui
débouche sur un glacier à remonter ; mais le brouillard ne nous permet pas de
savoir où nous allons ; La carte plus que rudimentaire ne sert à rien et n'est aucunement exploitable pour s’orienter.
Nous errons à vue et tombons sur une vieille trace difficile à décerner dans la neige, on se dit que c’est la trace à suivre et on monte en essayant de ne pas la perdre.
Peine perdue, il n’y a plus de trace et nous avançons à tâtons en espérant tomber sur de meilleures indices. Mais on se rend vite compte que c’est impossible d’avancer sans se perdre, d’ailleurs nous sommes probablement déjà perdu et en dehors de la trace directe.
Nous décidons de creuser un igloo et d’attendre à l’abri que le temps se calme, car il pleut toujours et nous n’avons pas pris la tente pour être plus léger. Pendant que je creuse l’igloo, Ben décide d’aller explorer les environs, car nous n’avons qu’une seule pelle.
Il revient plein d’espoir et dit qu’il faut tenter de monter plus haut pour s’avancer, nous sommes encore tôt dans la journée.
Nous errons à vue et tombons sur une vieille trace difficile à décerner dans la neige, on se dit que c’est la trace à suivre et on monte en essayant de ne pas la perdre.
Peine perdue, il n’y a plus de trace et nous avançons à tâtons en espérant tomber sur de meilleures indices. Mais on se rend vite compte que c’est impossible d’avancer sans se perdre, d’ailleurs nous sommes probablement déjà perdu et en dehors de la trace directe.
Nous décidons de creuser un igloo et d’attendre à l’abri que le temps se calme, car il pleut toujours et nous n’avons pas pris la tente pour être plus léger. Pendant que je creuse l’igloo, Ben décide d’aller explorer les environs, car nous n’avons qu’une seule pelle.
Il revient plein d’espoir et dit qu’il faut tenter de monter plus haut pour s’avancer, nous sommes encore tôt dans la journée.
Nous montons et arrivons sur une arête en rochers brisées et
arrivons à un sommet putride, le Cerro Madsen (1800m), on y voit toujours pas à
plus de 20m et nous nous apercevons que nous sommes perdus, rien ne correspond à
notre topo, et il pleut toujours, c’est vraiment la loose.
Nous regrettons de ne pas avoir pris la tente, mais à présent il va falloir se préparer à passer la nuit dans ce mauvais temps. Parfois il y a une petite accalmie, mais ça bruine toujours. En deux heures de temps nous bâtissons un bivouac 4 étoiles tout en pierre et à l’aide d’une couverture de survie nous nous mettons à l’abri.
Dans
notre malheur nous sommes quand même heureux qu’il n’y ai pas de vent, sinon
nous ne pourrions apprécier cette couverture étanche providentielle. La journée
passe et la pluie se transforme en neige et c’est relativement couché que nous
nous endormons, bercés par le bruit de la neige qui se dépose sur la couverture
de survie. Nous somnolons jusqu’au lendemain matin. On avait mis le réveil vers
4h00 mais il neigeait encore, le doute s’installe…
Nous regrettons de ne pas avoir pris la tente, mais à présent il va falloir se préparer à passer la nuit dans ce mauvais temps. Parfois il y a une petite accalmie, mais ça bruine toujours. En deux heures de temps nous bâtissons un bivouac 4 étoiles tout en pierre et à l’aide d’une couverture de survie nous nous mettons à l’abri.
Notre travail de 2 heures |
Le Cerro Madsen et notre désarroi |
Le lendemain nous sommes dépités car on sent qu’on a raté le
créneau.
On décide d’attendre que le ciel se déchire car nous sommes toujours dans le brouillard.
L’objectifs est revu à la baisse, nous allons essayer de repérer le bivouac du « Paso Superior » et y laisser du matériel pour la prochaine fois.
On décide d’attendre que le ciel se déchire car nous sommes toujours dans le brouillard.
L’objectifs est revu à la baisse, nous allons essayer de repérer le bivouac du « Paso Superior » et y laisser du matériel pour la prochaine fois.
Vers 10h00 du matin, ça y est on devine quelque chose, on n'est vraiment pas sur le bon chemin, pour nous on est foutu, c’est mort.
On a bivouaqué sur un sommet qui n’a rien à voir avec l’approche.
Il nous reste que 2
jours de bouffe et nous ne sommes toujours pas au pied de la voie. En plus on
s’aperçoit que la neige est bien tombée. Toutes les faces sont plâtrées, c’est
un carnage pour notre motivation.
On a bivouaqué sur un sommet qui n’a rien à voir avec l’approche.
Le Paso Superoir est en face de nous, oups |
Le peu de motivation qui nous reste nous fait descendre dans
un couloir d’éboulis enneigé. Et nous rejoignons une trace évidente que nous
n’avons pas trouvée la veille. Nous remontons tranquillement ensuite au camp
vers 1950m.
Il fait enfin beau, c’est magnifique et notre moral remonte. Ben
sur-motivé pour ne pas redescendre bredouille, se tâte à faire une tentative
mais la neige est ultra molle et c’est dans de la soupe qu’il faut remonter le
glacier pour atteindre la voie. C’est purement un travail de titan de tracer
dans cette neige sur-humide. Durant 2h00 on se demande si nous redescendons ou
si nous essayons d’aller voir.
En montant au Paso Superior |
Il nous reste un repas du soir et 8 barres de céréales chacun,
il nous faut au moins un jour pour faire la voie et un autre jour pour redescendre
si on va vite, au vu des conditions enneigées de la face.
Le constat est vite fait, on est vraiment limite au niveau nourriture.
Nous n’avons pas passé une bonne nuit et la trace à faire sur le glacier parait surhumaine tellement c’est mou, aucune voie n’est en condition. Tout les éléments et l’enchainement qui nous ont amenés là, nous incitent à rentrer et renoncer, mais c’est sans compter un relent de motivation incroyable de Ben.
Le constat est vite fait, on est vraiment limite au niveau nourriture.
Nous n’avons pas passé une bonne nuit et la trace à faire sur le glacier parait surhumaine tellement c’est mou, aucune voie n’est en condition. Tout les éléments et l’enchainement qui nous ont amenés là, nous incitent à rentrer et renoncer, mais c’est sans compter un relent de motivation incroyable de Ben.
On calcule le pour et le contre et c’est avec moult
réflexions que nous décidons de faire une tentative en partant le plus léger
possible. Nous passons l’après-midi à boire, manger (purée sans sauce !!!)
et à se reposer, car nous partirons vers 23h00 pour profiter du regel nocturne
et pouvoir atteindre le début de la voie
au lever du jour.
C'est l´heure de la sieste avant un réveil vers 22h00 |
Le réveil sonne, il est 22h00, nous avons dormi 2 heures,
il fait encore jour et nous avalons un paquet de biscuits et un litre de Tang
chaud. On range les duvets et on les laisse au bivouac, on part le plus léger
possible. 23h00, la neige est dure, c’est une aubaine et c’est au pas de course
que nous rejoignons la rimaye. Il fait nuit et nous décidons de rejoindre la
brèche des italiens par des grandes pentes de neige très raide et du mixte
facile. Ça roule pas mal et nous arrivons vers 2h30 à la brèche. La suite est
facile et vers 4h00 nous attaquons la première longueur de la « Franco-Argentine ».
Piolets en main et crampons bien calés, c’est parti. Il est impossible de
grimper en chausson et du coup nous grimpons lentement et de temps en temps
nous tirons sur les protections.
On est parti en mode sans pitié. Lorsque la
longueur est trop dure le second avec le sac à dos jumarde dans les parties les
plus raides pour gagner du temps.
Première longueur en 6a+ ça promet pour la suite |
On se croirait en face en Alaska |
Ben en plein boulot |
Pas de vent, c’est énorme et très appréciable. Toutes les longueurs sont dures pour le coup. C’est un véritable combat de rue dans chaque longueur. A aucun moment on se dit que c’est gagné et c’est mètres après mètres que nous nous rapprochons du sommet.
C'est raide tout le long, c'est incroyable |
En 3 nuits nous avons que très peu dormi et par à-coups.
Du dry dément je vous dis |
La dernière longueur en 6b/A2 |
Ben et moi, joie et fatigue |
Une fois le panorama bien dégusté et quelques photos
mythiques en poche nous prenons la direction de la descente.
L’objectif
principal de la descente consiste à ne pas coincer la corde en la rappelant,
quitte à faire plein de petits rappels. Par chance il n’y a toujours pas de
vent et nous rejoignons la selle neigeuse en une quinzaine de rappels. On
rejoint la brèche des italiens et nous continuons à caler 6 rappels. Il nous aura
fallu cinq heures pour descendre la voie en rappel.
Le Cerro Torre, notre prochain rêve et derrière lui le Hielo continatale, le plus grand glacier du monde |
La journée à été chaude et la neige est à présent molle,
nous nous enfonçons allègrement dans une neige merdique et rentrons au bivouac en
plus d’une heure, exténués. La faim est intenable mais rien à faire les sacs sont
désespérément vide de nourriture. Nous nous endormons direct et sombrons dans
un coma de fatigue le ventre creux.
Le lendemain matin nous rangeons les sacs et partons sans
même boire. El Chalten nous obsède car nous savons que là-bas il y a la
nourriture, la tente, le confort, la vie simplement.
Il est 13h00 quand nous arrivons, nous sommes de vrai
zombies, les gens se retournent en nous croisant. Le camping enfin atteint, nous
mangeons 3 repas en l’espace de 2 heures, une vraie boulimie.
Notre tente au camping et en toile de fond le Fitz Roy, étonnamment proche et si loin en réalité |
Un premier sentiment d’allégresse nous envahi, nous venons
de réaliser un premier rêve. A présent on va se concentrer sur le Cerro Torre
et la voie de la face ouest en espérant un autre créneau favorable. Pour les 6
prochains jours du vent du vent et encore du vent …
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire