lundi 15 mars 2010

6 jours dans les Grandes Jorasses par - 34°C ...

Pour notre première expérience dans une hivernale, on peut dire que nous avons été gâtés. C'était la période la plus froide de l'hiver.
Du froid, du vent, un peu de neige et des sacs pesant au total quasi 100kg; non nous n'avons pas réussi "Eldorado". Mais nous avons appris énormément de choses, qui vont de la gestion du froid, des vêtements, des chaussures, notre résistance au froid, comment aborder une hivernale, les vivres de courses à emporter par grand froid ...

Nous avions prévu 10 jours pour faire la voie, portage des sacs compris। Mais on s'est vite aperçu que cela allait prendre plus de temps que prévu.Avec ce mauvais temps nous avons mis 3 jours pour atteindre la rimaye et en y laissant beaucoup d'énergie. Les 2 premières nuits nous dormions au pied de la face dans ce que l'on pourrait appeler un camp de base. On avait construit un igloo pour manger, un emplacement pour une tente et des toilettes et tout cela entouré d'un rempart de blocs de neige.

Le 2ème jour on équipe les 2 rimayes, dans le mauvais temps et les spindrifs.On arrive même à fixer 2 longueurs de corde en traversée pour le lendemain.

Le 3ème jour le gros mauvais est là, on y voit pas à 10 mètres, ça souffle fort। On décide de monter les affaires à la rimaye et de dormir là-bas. On va mettre quasiment 4 heures pour faire juste ça !! Arrivés à la rimaye on creuse un autre igloo pour s'abriter des spindrifs qui ressemblent plus à des avalanches qu'à autre chose. Impossible de grimper ce jour là.

Il faut que je vous dise que même dans les igloos il faisait froid, mais très froid, de l'ordre de -15°C environ.

Le 4ème jour, miracle, il fait beau en sortant de la rimaye. Banzaï, on décolle. L'objectif est de dormir au pied des goulottes "MacIntyre" et des "Japonais", soit 350m de pente de glace plus ou moins en glace noire. A chaque longueur il faut hisser les patates et les portaledges.

Petit problème de logistique : nous n'avions pris que 9 broches à glaces, ça fait pas lourd. 2 au relais, 2 pour le relais d'après, et pour gagner du temps je partait avant que le 3ème second arrive (il devait larguer les patates d'en bas). Ce qui m'en faisait encore 2 de moins pour grimper ces grandes longueurs de 60m. Nous mettions donc quasi 1 heure par longueur entre la grimpe, la confection du relais (je faisait une lunule par relais, reliée aux 2 broches) et le hissage. Vers 17h00 nous sommes là où nous voulions, je continue et fixe une longueur de plus dans le couloir des Japonais pendant que Thomas et Ben installent le bivouac.

5ème jour : Cette nuit nous mangerons debout sur une petite vire de glace, creusée péniblement, et nous nous installerons dans nos portaledge. Nous ne dormirons pas, le froid vif nous préoccupe car les pieds ne sont jamais très sensibles. Au matin, les duvets déjà bien givrés n'ont plus trop de gonflant, ils sont tout ratatinés ! Il fait assez beau mais du foehn souffle de l'Italie. On ne sait pas quand le mauvais va arriver à passer les Jorasses. On se concerte tout les 3 en prenant le petit déjeuner et finalement on décide de rebrousser chemin. Nous savions que nous allions buter au vu des conditions météo, mais nous voulions continuer jusqu'à épuisement des vivres de course, pour voir ! Pour savoir jusqu'où on peut aller ! Mais le froid a eu raison de nous et nous avons entamé la descente en rappel. Vers 10h30 du matin ça y est le mauvais déborde et descend les Grandes Jorasses, tel une vague de désolation. Le vent se lève, du grésil tombe et des spindrifs coulent de plus en plus gros. Nous avons bien fait de ne pas continuer. Nous arriverons finalement au pied de la face vers 16h00 pour découvrir notre camp de base assez enneigé. On le déneige et on se couche.

6ème jour : Le vent aura soufflé toute le nuit et vu l'épaisseur des duvets qui ressemblent plus à des crêpes qu'autre chose, ont se dit encore une fois "on a bien fait de descendre hier".

On refait les sacs dans le vent et le mauvais, ça pèse encore bien lourd même avec 6 jours de nourriture en moins. On commence à skier sans rien y voir, et du coup cela se transforme très souvent en chute désordonnée (jour blanc = pas d'équilibre). On rejoint la vallée blanche et ça va mieux, puis nous optons pour le petit train du Montenvers car les sacs sont vraiment trop lourds, on va se faire mal dans ce border cross tout gelé.

Nous voilà enfin en bas, on commence à appeler tout ceux qui nous ont vu partir, pour les rassurer que tout va bien maintenant.

Toute la vallée était au courant que nous étions là-haut dans le mauvais. Et tous était inquiets, mais nous avons été sages et rien de grave n'est arrivé. Cela aurait pu être autrement si nous n'avions pas décidé de descendre à temps. Au final 2 jours de beau, le premier lorsque nous descendions la vallée blanche et portions les sacs et le 4ème !!! Du froid qui est descendu vers les -34°C et en moyenne du -20/25°C, sympa les vacances.

Belle expérience de montagne rude à ne renouveler qu'une fois par an maximum.

samedi 6 mars 2010

à l'attaque d'Eldorado dans les Grandes Jorasses

Comme annoncé, vendredi matin montée avec le reste du matériel pour une répétition d'Eldorado (voir photo du message de lundi dernier).
Beau temps, tout va bien.
Arrivés à la rimaye, après avoir récupéré le matériel laissé après Leschaux mercredi, on s'installe pour la nuit : un igloo -ou plutôt un abri troglodyte- dans la rimaye de glace.
Samedi, on remonte les 350 m de pente pour rejoindre le pied de la voie et on s'organise pour les 10 prochains jours dans Eldorado. Ce soir on va passer notre première nuit sur portaledge... en espérant que la météo sera clémente et nous permettra de grimper tous les jours.
Le téléphone ne passera sûrement plus très bien une fois dans la voie.
Mais si j'ai des nouvelles, je ne manquerai pas de les partager avec vous.
Brigitte

jeudi 4 mars 2010

Portage au pied de la face ...

Nous sommes partis hier pour faire un portage de matériel et de nourriture en pensant arriver à la rimaye de la face. Mais c'était la tempête : vent et grésil. On a pu progresser jusqu'au refuge de Leschaux. Mais on n'a pas vu les Grandes Jorasses. On est redescendu, un peu déçus, mais il le fallait.
Ça nous a donné un aperçu de ce que peut être une journée dans la tourmente, c'est pas cool !
On se repose jeudi, car la météo est mauvaise, et on repart vendredi : la météo prévoit du beau. Et là on ne redescendra pas avant d'avoir fini, on l'espère.

lundi 1 mars 2010

Grandes Jorasses, nous sommes prêt !

Nous montons aujourd'hui, Ben Guigonnet, Thomas Arfi et moi sur Chamonix. Le coffre de la voiture est plein, comme à chaque fois que l'on se rend sur Cham. Plein de matériel pour travailler et aussi pour se faire plaisir et accomplir de grandes choses.Après plusieurs dizaine de coups de fil ses dernière semaines, nos sacs sont prêts pour les Grandes Jorasses. L'objectif cette fois-ci est de répéter une voie à Babanov, "Eldorado". Ouverte en 1999 en 15 jours, puis répétée par Lionel Daudet en solo hivernal en 15 jours en 2002. C'est donc un morceau de choix que l'on va essayer d'honorer.Chacun à acheté ses lyof et préparer sa petite lingerie fine pour en découdre. Nous allons nous rejoindre ce soir lundi 1 mars sur Chamonix.Je dois vous dire que pour moi cette face nord des Grandes Jorasses reste encore inconnue, je n'y ai jamais mis les pieds. C'est donc avec impatience, envie, un peu de peur (normale au vu du monstre) que j'ai l'intention de m'y rendre. Ben et Thomas y sont déjà allés pour faire l'éperon Croz et le Linceul, mais je suis sûr qu'ils sont comme moi.L'expérience du big wall on l'a, mais le big wall en face nord, ça, pas vraiment. Car "Eldorado" ne va pas être une petite ballade: on compte mettre 10 jours pour en venir à bout. 10 jours en face nord à gérer les gants, faire de l'eau, les orteils, ça n'a rien à voir avec la paroi d'El Capitan où l'on grimpe torse nu et où le problème c'est plutôt les coups de soleil.Mais bon il faut bien refaire le plein de nuits en portaledge pour arriver au quota de l'année dernière (environ 25 !), c'est tellement bon.La météo est plutôt mauvaise en ce moment, on va en profiter pour faire un premier portage et puis bosser un peu et dès qu'il y a un créneau qui nous permet d'aller au pied du mur, on file. Après on verra mais on arrivera quand même à faire quelques longueurs dans le mauvais, ça c'est l'avantage de l'artif.Je vous tiendrais au courant de l'avancement après le premier portage.
A plus les amis ...