dimanche 23 octobre 2016

Face sud Du Nuptse

Quelle formidable aventure…
Partis le 13 septembre au Népal, l’objectif ouvrir une nouvelle voie dans la face sud du Nuptse Nup II, 7742m. Ce sommet est situé dans la vallée du Kumbhu juste devant l’Everest et sur la même crête que le Lhotse (8516m). L’équipe sera la même que celle du Siula Chicco (Ben Guigonnet, Robin Revest, Helias Millerioux et moi même), une équipe qui marche. Après une acclimatation d’environ un mois nous sommes prêt pour tenter la face…
Impossible d’imaginer des longueurs aussi belles dans cet endroit aussi reculé. Quel morceau de choix. J’ai eu la chance de gravir l’une des plus belle longueur extrême de mixte de ma vie et ça a presque 7000m. Merci le gang des moustaches de m’avoir amené jusque là.
Cette ascension est l’une des plus enrichissante que j’ai eu la chance de vivre. Entouré d’une équipe formidable et soudée nous avons progressé à travers de grosses difficultés, partagé les longueurs selon la motivation du moment de chacun. Je suis vraiment fier d’avoir été parmi cette unité.
Des neuf dernières expéditions, depuis que j’ai commencé il y a 12 ans, je n’aurait jamais autant appris que durant cette dernière. Car c’est la première fois que je n’atteint pas le sommet.
Le succès, si proche et à la fois si loin.

Que retirer de cette expédition au Nuptse ?
Première expérience en très haute altitude pour moi. Tout ce que je peux dire c’est que tout ce que j’ai fais avant me paraît bien plus facile …
Nous n’étions pas loin de réussir, en renonçant vers 7350/7400m. Mais là haut toute décision est cruciale.
Les prévisions météo, le vent, la fatigue, les bivouacs qui s’enchaînent, le stress, les dangers objectifs, l’altitude, l’hydratation, la nourriture qui ne passe plus, le manque d’énergie, les petits bobos, les réchauds qui mettent de plus en plus de temps à fournir l’eau si vitale, la gestion des chaussettes, duvets et gants qui s’imprègnent d’humidité diminuant leurs performances, alors que les conditions deviennent de plus en plus extrêmes. Tout cela mêlé est absolument extrême à gérer…
Nous avons sûrement pris une mauvaise décision là-haut en tentant le tout pour le tout sur cette cinquième journée en mode one push, sans sac à dos, sans back up si nous butions sur des difficultés trop longue en temps à surmonter. 700m à avaler à plus de 7000m, trop présomptueux, trop confiants. Surtout que l’itinéraire était incertain, on se disait tous que ce serait pas évident, mais surmontable. Il n’en fut rien, nous avons gravis des pentes raides, puis des ices flûtes extrêmement raides, improtégeables sur 300m en 8 heures… Nous n’avions pas fait la moitié du chemin qui nous restait à faire et nous n’étions toujours pas dans du terrain facile. L’altitude entamait notre confiance, notre dextérité, notre mental, nos capacités tout simplement. Et tout prendrait encore plus de temps plus on monterait. Une dernière longueur qui menait à un cul de sac à fini par nous achever et nous avons réalisé d’un coup que tout était fini, que c’était trop long, trop dur d’atteindre le sommet ce jour là. Sans bivouac sur nous il nous était impossible d’en rester ici et de retenter, le lendemain, de notre point le plus haut, d’atteindre le sommet. Erreur stratégique flagrante mais qui a ce moment là nous paraissait évidente.
Je suis heureux d’avoir partagé cela avec  mon meilleur compagnon de cordée, Ben ainsi que Robin et Hélias, deux jeunes et talentueux alpinistes qui me sont désormais encore plus intimement chers.
Nous avons par cette tentative démontré que tout était possible, mais nous sommes aussi très chanceux d’être redescendus sans encombre tout les quatre.
Tout cela m’encourage à persévérer pour apprendre encore plus et pouvoir peut être un jour rejoindre la cime de l’une des parois les plus technique d’Himalaya.
Nous avons, avec notre jeune équipe, qui ne se prends pas au sérieux, tenté de briser les barrières en s’attaquant à un monument de difficultés et d’engagement au Népal. La face sud du Nuptse haute de 2000m et sortant entre 7740m et 7860m, ne compte que 3 itinéraires distincts. Et pourtant, tenté des dizaines de fois par des alpinistes extraordinaires, elle a su résister assauts après assauts.
Merci à tous ceux qui ont cru en nous et qui nous ont soutenus, la famille, les amis, les connaissances, les passionnés de montagne.
Merci aussi à tout les sponsors de l’équipe qui ont cru en nous pour ce que nous représentons : Petzl, Salomon, la FFME, Julbo, Blue Ice, Sidas, Inreach, Daylong, Scott, Outdoor Research, Moken, Garmin, Simond et Beal
C’est l’une des plus grande déception pour nous, mais sachez qu’à présent nous allons revenir plus fort, car nous apprenons très vite…
Le nouveau blog 2.0 c'est ici  : www.freddegoulet.com

mercredi 25 novembre 2015

Goulotte Raie des fesses, sortie col Ouest du Pelvoux

Ben Guigonnet est de passage dans les Hautes Alpes, pour le festival de film de montagne à Gap. Il voudrait faire un peu de montagne, lui, qui a peu parcouru les Ecrins. Je suis heureux de pouvoir l'emmener voir nos belles montagnes.
Je lui propose donc d'aller voir du côté de la "Raie des fesses" et voir si on peut sortir par l'intégrale. On ne rentre donc pas trop tard de la soirée à Gap, il est minuit tout de même. Le temps de préparer les sacs et de faire une sieste de 45 minutes et nous voilà sur le pied de guerre pour rejoindre le Pré de Madame Carle, il est 3H30 du matin. Nous marchons tel des zombies sur la moraine du glacier noir.
La nuit noire et notre rythme de marche soutenu, nous font perdre la trace pour aller au pied de la goulotte, demi tour, pour retrouver le bon chemin.
Ça y est nous sommes au pied de la "Raie des Fesses" en face nord du Pic Sans Nom, il est 7H00 lorsque nous attaquons à grimper. La première longueur est trop peu fournie pour oser la grimper. Nous passerons donc par la version dry à droite. Trois longueurs intéressantes et assez faciles par rapport à la cotation annoncée. La première longueur côté M5 est plutôt M3+/M4. Les trois autres  longueurs nous les ferons en deux. 
Le rocher est bien sec depuis les derniers épisodes de vent, d'ailleurs les faces nord se sont bien asséchées en générale. On grimpe sans gant, sans avoir froid, ça se protège bien et c'est dans le 5, pas de 6a.
Nous rejoignons rapidement la goulotte et faisons un peu de corde tendue, la neige est bien compacte, nous avançons vite jusqu’à la longueur "crux" au milieu de la goulotte. Là aussi c'est en bonne condition.

Ben continu en corde tendu au dessus et nous voilà vers midi au sommet de la goulotte.
Nous regardons la sortie par l'intégrale ouverte par Gabarrou et Marsigny, mais ça semble trop peu fourni pour se protéger convenablement. 
Nous choisissons donc de sortir par le col Ouest du Pelvoux. Nous remontons la niche à l'extrême gauche par de grandes longueurs en traversée. 
Vers 15h30 nous y sommes. 
Et nous enchaînons directement la descente vers Ailefroide en passant par le refuge du Sélé. Il est 18h00, nous rentrons à la maison pour dormir enfin!!!
Merci Ben, tu reviens quand tu veux.

mardi 3 novembre 2015

Le Prestige des Ecrins

La face nord du Pic Sans Nom (3913m)
Les 19, 20 et 21 octobre dernier, Ben Brochard, Jonathan Joly et moi même avons eu le privilège de parcourir un nouvel itinéraire dans  la fameuse face nord du Pic Sans nom, un monument dans les Ecrins.
La fine équipe
L'année dernière déjà nous voulions y aller, mais, les circonstances ont fait que nous n'avons pas pu tenter la voie. Et cette année un collègue parti travailler dans le coin nous ramène un cliché avec la ligne à nouveau visible. On ce motive pour essayer cette année, je sais que les conditions ne sont pas optimum, mais dans ma tête, on y va juste pour voir.
Il y a quand même de grosses incertitudes par rapport à deux sections, qui ont l'air dur.
Jo me demande si nous prenons le tamponnoir et je lui réponds non! Comme ça si cela ne passe pas on redescend plus tôt. Et puis c'est tricher, même si en fond de sac ça peux servir pour redescendre en sécurité.
On se donne donc tous rendez vous vers Vallouise à 6h30 du matin pour finaliser les sacs et choisir le matériel. Il fait nuit noir et nous sommes donc tous les trois en train de trier sous les regards des travailleurs matinaux.
Sur le parking au bord de la route
Nous prenons de quoi faire un seul bivouac, un sac de hissage, une dizaine de pitons, beaucoup de petits friends et coinceurs, et une dizaine de broches
On pose une voiture au fond du camping d'Ailefroide et nous continuons en voiture jusqu'au parking du Pré de Madame Carle. Il est 7h50 nous démarrons l'approche.
Ben voulait absolument prendre des bâtons...
+oilà la face
Adieu soleil
11h15, nous faisons une petite pause pour analyser la voie et manger une soupe chinoise.
Le repas du midi
12h30, Ben attaque la première longueur d'accès à la goulotte. Après une bonne traversée, nous voici au pied de la première incertitude.
Ben dans la traversée
On tire à "chi-fou-mi" pour savoir qui s'y colle, et Jo remporte la partie.
Ca a l'air dur mais très bien protégeable, ce qui est chose rare dans les Ecrins.
Jo dans la première longueur dure
Jo nettoie la longueur pour trouver de bonnes protections, en tout cela aura pris une bonne heure et demi, puis il nous fait monter. Au final avec le nettoyage nous évaluons cette longueur de 40m à M5/M5+.
Jo est fatigué à présent, je prends le relais, la suite est plus facile, mais il est déjà tard, je ne ferais que trois longueurs de plus.
Ambiance de malade
Il est déjà temps de penser à faire le bivouac avant l'arrivée de la nuit. Et surtout il n'y a pas beaucoup de possibilités dans cette face de trouver des bivouacs confortables. Avec l'expérience, je sais qu'il vaut mieux dormir sur un bon bivouac que d'essayer d'avancer et se retrouver à dormir sur une fesse.
Ca tombe bien car mon dernier relais se trouve juste à côté d'une petite roture, il y a beaucoup de neige. En creusant ça va être royale. Jo prépare le bivouac, Ben va fixer la corde au dessus et puis moi et bien je l'assure.
C'est parti pour la première nuit
18h30, le bivouac est prêt, la nuit vient de tomber et le réchaud ronronne déjà, tip top.
Réveil programmé pour 6h45, car il fait jour vers 7h30.
La nuit a été plutôt bonne malgré les spindrifts par à-coups.
Le premier bivouac
Ben remonte sur la corde fixée la veille et nous assure. Encore 3 longueurs pour Ben et je prends le relais.
Ben dans les premières longueur du J2
Deux longueurs nous permettent de rejoindre le deuxième passage délicat de la voie. Nous venons de retrouver la voie "George - Russenberger", car un piton en témoigne.
La longueur commune avec la Russenberger
Une longueur de 20 mètre commune avec la "Russenberger", en technique dry, évaluée à M5+/M6. Là encore assez bien protégeable.
La goulotte de la raie des fesse juste en dessous!
La suite, nous décidons de partir tout droit dans un passage raide, la "Russenberger" quand à elle part à gauche dans un système de dalle plus facile, mais nous ne nous sentons pas de grimper dans ces dalles qui ont l'air improtégeables et enneigées. Ici encore c'est dur et très technique. Des micro prises pour les pieds, juste au dessus du relais. Les copains ne parlent plus, car, si chute il y a, je termine sur eux. La suite part en traversée vers un bon béquet. Finalement cette longueur sera pour moi un M6. Encore une longueur en dry en traversée vers la droite. Le début est cool et tout de suite derrière il y a quelques mouvements très fins, sans trop de pieds. Ca a été un gros stress ici pour essayer d'enchaîner la longueur à vue. Une fois arrivé sur les placages de neige, nous retrouvons une traversée commune avec la "Russenberger", mais il n'est pas possible de ce protéger convenablement, du coup j'enfonce les broches dans cette neige à peine compacte et les couple pour faire un semblant de point de protection. J'évalue cette longueur à un gros M6.
Jusqu'ici tout va bien
Les copains quand à eux n'ont pas grimpé ces deux dernières longueur en libre, ils ont préféré jumarder car les sacs sont trop lourd, ils auraient perdu du temps et de l'énergie.
Ca y est je passe le relais à Jonathan pour qu'il s'occupe de la traversée pour rejoindre le deuxième système de goulotte suspendu au dessus de la barrière de rocher raide.
Jo dans la traversée commune de la Russenberger
Gaaaaazzzz
Deux longueurs de plus sur de la neige glace inconsistante ...
A chaque fois les relais sont long à faire, pour être sûr qu'ils ne s'arrachent pas sur une mauvaise chute, cela nous fais perdre beaucoup de temps. On le savait, mais la réalité est compliquée.
Nous décidons de nous arrêter là pour aujourd'hui d'autant plus que nous sommes à nouveau à un bon emplacement pour faire le bivouac. 11 longueurs pour aujourd'hui.
Bivouac deuxième nuit
Ce bivouac n'était pas prévu mais nous étions déjà résignés à le concevoir depuis la matinée. Ca va, il est confortable.
Confort, après l'effort d'aménagement
Nous mettons les couvertures de survie pour se protéger des spindrifts mais un peu de vent aura raison des couvertures durant la nuit...
Le réveil, pareil que la veille. Nous savons que les difficultés sont derrière nous à présent il faut sortir de la face le plus rapidement possible.
Ce matin il y a une grosse activité avalanche sous le col Ouest du Pelvoux. Il y a même une des avalanche qui a traversé le glacier noir...
Grosse avalanche
très grosse !!
Après avoir remonteé deux grandes longueurs de 60 mètres, nous arrivons à nouveau sur une partie déjà parcourue auparavant, puisque empruntée par de nombreuses cordées. Tracer un itinéraire droit n'aurait rien rajouté et nous en avons marre du froid, c'est notre troisième journée dans la face. Ca commence à faire long cette histoire, il est d'ailleurs rare de rester aussi longtemps dans ces face nord du glacier noir me fait remarquer Jonathan.
Allez Jo au boulot !
Jo s'occupera de toutes les longueurs de cette journée, merci à lui car nous sommes bien fatigués. Nous arrivons à la brèche faîtière (3810m) à l'ouest du sommet, il est 14h30.
Arrivé à la brèche
Nous laissons quelques cordelettes et pitons pour descendre en rappel et retrouver la descente normale du Pic Sans Nom. En bas nous savourons le soleil si généreux et laissons éclater notre joie. Maintenant il faut rentrer à la voiture et rejoindre la maison chaleureuse et son confort, nous l'avons bien mérité.
21h30, les copines sont là et nous ont préparé à manger, au top les filles.

Au final notre nouvel itinéraire s'appel "Le prestige des Ecrins", 16 longueurs originales sur les 29 totales, pour une cotation globale en ED, 1000m, M6 (ou 6a), grade 5 en tout.
Le topo
Merci les copains
Enfin le soleil